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Etudes de la purge intestinale, un mécanisme de protection de l’épithélium intestinal aux infections bactériennes et aux xénobiotiques

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Le tractus digestif représente la plus grande surface d’interaction d’un organisme avec le milieu extérieur. La nourriture peut être contaminée par des microorganismes ou par des substances xénobiotiques comme des métaux de transition ou des oxydants forts. L’intestin doit donc remplir plusieurs fonctions à la fois : la digestion et l’ingestion de nutriments et de solutés, la défense contre les infections et les xénobiotiques, et maintenir un microbiote qui joue un rôle essentiel dans tout l’organisme, allant jusqu’à influencer le comportement.

La drosophile est un organisme modèle qui permet des grandes avancées dans de multiples domaines de la biologie, notamment par la puissance de sa génétique. Ainsi, nous avons réalisé il y a plusieurs années le premier crible à l’échelle d’un génome entier pour identifier les gènes impliqués dans la défense de l’hôte contre l’ingestion d’une bactérie entomopathogène, Serratia marcescens (Cronin et al., Science, 2009). A notre grande surprise, nous avons isolé peu de mutations affectant le système immunitaire de la drosophile. En nous intéressant à une voie de signalisation, nous avons pu démontrer que celle-ci participait à la maintenance de l’homéostasie de l’épithélium intestinal. Les entérocytes sont tués au cours de la phase chronique de l’infection et remplacés par la prolifération accrue des cellules souches intestinales. Ainsi, la défense de l’hôte comprend deux dimensions complémentaires, la résistance dans laquelle le système immunitaire attaque directement le pathogène et la résilience qui permet à l’hôte d’endurer et de réparer les dégâts infligés soit par les facteurs de virulence du pathogène, soit par sa propre réponse immunitaire.

Tractus digestif

Nous avons identifié un mécanisme de résilience des entérocytes qui prend place au cours de la phase précoce de l’infection. Trois heures après le début de l’ingestion de S. marcescensl’épithélium intestinal devient fin avec une perte considérable de l’épaisseur de l’épithélium. Cet épithélium reprend sa forme originelle en quelques heures.

Ci-dessus, l’image de sécrétions des cellules épithéliales lors d’une purge (indiquées par les deux flèches) et deux vidéos de la purge cytoplasmique sur la lignée de cellules épithéliales humaines Caco-2 (le pôle basal est en haut, et le pôle apical en bas).

 

Ci-contre, on observe sur la vidéo la purge cytoplasmique in vivo par les cellules intestinales de la drosophile (le pôle basal est en bas).  

Nous avons établi qu’une toxine bactérienne formant des pores membranaires, l’hémolysine, est responsable de ce phénomène. Il y a formation rapide de gouttelettes lipidiques et formation de mitochondries géantes avant l’extrusion limitée du cytoplasme des entérocytes dans la lumière de l’intestin, d’où l’amincissement de l’épithélium. Ce processus n’induit cependant pas la mort des entérocytes. La phase de récupération est remarquablement rapide et implique des mécanismes de compensation métabolique.

Nous avons ainsi identifié une centaine de gènes requis dans ce processus de récupération. De manière intéressante, nous avons démontré que ce processus d’extrusion cytoplasmique couplé à une récupération rapide est aussi induit par l’hémolysine chez les abeilles, les souris et des cellules humaines intestinales en culture.

Ces résultats ont été publiés dans la revue Cell Host and Microbe. 2016 Dec14;20(6):716-730 et résumés dans le communiqué de presse du CNRS. Par ailleurs, l’ingestion de xénobiotiques induit un phénomène similaire et implique les mêmes gènes. Nous en étudions actuellement les différentes phases, depuis les mécanismes qui amènent à l’extrusion du cytoplasme par de larges ouvertures, jusqu’aux processus de réparation.