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Les virus sont impliqués dans 10 à 15% des cancers chez l’homme et représentent un enjeu majeur de santé publique. Parmi ces virus oncogènes, l’herpèsvirus associé au sarcome de Kaposi (KSHV) est responsable de plusieurs cancers agressifs entraînant un pronostic vital très faible chez les patients atteints. L’équipe de Sébastien Pfeffer s’intéresse aux microARN (miARN) viraux, de petites molécules jouant un rôle crucial dans la persistance du virus au sein de la cellule infectée et les pathologies associées. Dans un article publié dans la revue Nucleic Acids Research, l’équipe a mis à jour un nouveau mécanisme moléculaire mis en place par le virus afin d’ajuster les niveaux d’expression de ses miARN.

A l’heure actuelle, aucun traitement spécifique n’existe contre les cancers induits par le KSHV. De plus, faute d’antiviraux efficaces, le virus persiste tout au long de la vie de son porteur. Ceci est d’autant plus préoccupant que cette persistance appelée également latence est le facteur principal de l’oncogenèse. Au cours de la latence, le virus limite la production de ses protéines qui pourraient être détectées par le système immunitaire. Au contraire, il produit de petites molécules non-immunogènes, les miARN. Ces dernières agissent via un mécanisme de l’ARN interférence, permettant ainsi de réprimer la production de protéines nécessaires pour la réponse immunitaire et les processus anticancéreux. Ils jouent donc un rôle incontestable dans le cycle viral. Cependant, la biogenèse de ces miARN doit être finement régulée afin d’en obtenir une quantité suffisante et le virus a mis en place une variété de stratégies pour la contrôler.

Dans ce cadre, l’équipe de Sébastien Pfeffer a étudié en détail la maturation de dix miARN du KSHV dont la particularité consiste à être organisés en cluster et donc produits à partir d’un seul transcrit primaire. Les chercheurs ont découvert que la première étape de la maturation, le clivage par un complexe protéique appelé le Microprocesseur, obéit à une régulation hiérarchisée qui nécessite la présence de certains de précurseurs (pré-miR-K1 et -K3) directement sur le transcrit primaire (en cis). L’identification de ce phénomène a permis de développer une nouvelle stratégie d’inhibition de l’expression des miARN viraux dans les cellules infectées par le KSHV. Cette approche innovante consiste à bloquer la maturation de tout le cluster en ciblant uniquement le pré-miR-K1 avec un oligonucléotide antisens. L’ensemble de ces résultats apporte un nouveau regard sur la biogenèse de ce cluster ainsi qu’une potentielle piste thérapeutique pour contrecarrer les effets néfastes des miARN viraux.

Shéma sur la publication KSHV
L’herpèsvirus associé au sarcome de Kaposi (KSHV) exprime un cluster de microARN (miRNA). La production de miRNA matures à partir de ce dernier est stimulée par la présence de certains précurseurs de miRNA (indiqués en vert) sur le transcrit primaire. Le ciblage de ces éléments régulateurs par des oligonucléotides antisens contenant des résidus LNA (locked nucleic acids, en rouge) permet d’inhiber l’expression de tous les miRNA provenant du cluster

Lien publication : https://academic.oup.com/nar/advance-article/doi/10.1093/nar/gkab731/6355881

Contact : Dr. Sébastien Pfeffer, s.pfeffer@ibmc-cnrs.unistra.fr

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